J'ai finalement réussi à mettre la main sur deux singes échappés du Lab et
je les aime beaucoup. S'il y a un jouet qui doit être vu en vrai pour être
vraiment apprécié, c'est bien le Playing Art. Quand j'ai vu les premières
images du concept, il y a un lustre ou deux, je dois avouer que j'étais un
peu sceptique, malgré mon enthousiasme pour toute nouvelle initiative
dans le domaine du toy. La forme ne se laisse pas si facilement
apprivoiser, avec ses longs bras tubulaires en arceaux, sa face aplatie et
ses courtes pattes sans articulations. Et puis, au fur et a mesure que le
projet se précisait, quelques détails m'ont intrigués, comme le joint à
rotule pour la tête ou la queue flexible. Cette face plate continuait à me
déranger jusqu'à se que je me rende compte que la tête était en fait un
hémisphère et non pas un disque, comme je l'avais cru. Mais a vrai dire,
quelles que soient les qualités ou les supposés défauts de la plate-forme,
ce qui a vraiment achevé de me convaincre, ce sont les interprétations de
Spasm One et Lejam. Dans les deux cas, je trouve que la réussite est
complète, tant du point de vue de l'idée que de la réalisation graphique.
Comme je l'ai déjà dit (pas
uniquement par flagornerie) dans le topic
"Playing Art", les transformations en statuette et en robot sont saisissantes
parce qu'elles exploitent vraiment la forme de base de façon
convaincante, et pas seulement décorative. C'est aussi pour çà que le
Woodi me plaît moins (pardon à l'artiste): là où Aro "s'exprime sur un
support", Spasm et Lejam font un véritable travail de designer, en se
mettant au service d'une forme et d'un concept. En plus, il y a des rappels
de formes et de couleurs entre Bali-Bali et Moon-K, ainsi qu'un contraste
thématique (l'un traditionnel, l'autre futuriste). qui font que je me voyais
bien adopter ces deux-là.
Il arrive parfois qu'on soit déçu au déballage d'un jouet, qui rendait mieux
sur photo (surtout s'il s'agissait d'un prototype), mais ici c'est le contraire
qui se produit. C'est dans l'espace que la forme un peu inhabituelle du
Playing Art prend tout son sens. Je pense qu'une des raisons vient de la
combinaison d'angles et de courbes, de surfaces planes et sphériques: des
caractéristiques que le Playing Art partage avec le Bearbrick et la
Lamborghini Countach
Sérieusement, sans tout a fait se hisser au
niveau de ces deux classiques du design industriel, le Playing Art dégage
une impression "vintage", dans le sens d'un objet épuré et un peu rétro.
On est plus proche de l'objet, du bibelot (dans le bon sens du terme) que,
disons, du kaiju ou du vinyl urbain. Il s'en dégage aussi une atmosphère
européenne, particulièrement dans le traitement des pieds, très stylisés,
officiant plus comme un support et s'effaçant au profit de très
belles mains évoquant plus Tintin que Mickey ou Mazinger.
La réalisation tient ses promesses: finesse des détails technologiques sur
le Moon-K, jeu du mat et du brillant sur le Bali-Bali: les finitions renforcent
l'illusion de vérité. Toutefois, au toucher, le coté artisanal de la production
se fait sentir (il s'agit tout de même d'un jouet d'artiste produit en petite
série). Non pas que cela nuise au Playing Art, au contraire. L'objet est très
agréable au toucher et se laisse bien manipuler. Mais on sent qu'on n'a
pas affaire là à une production industrielle et cette impression fait aussi le
charme du jouet et lui donne un coté chaleureux.
Peut-être dans le même ordre d'idée, la planche d'autocollants du Moon-K,
inspirée du modélisme et fleurant bon le DIY, incite a s'approprier le singe
dans ce qu'il a de plus personnel: les yeux. J'ai un peu hésité à le faire,
d'une part parce que j'aimais bien la visière noire et robotique de base et
aussi parce que je ne voulais pas détruire les stickers--repositionnables
nous avait-on assuré. En fait, je n'ai pas trouve comment les enlever sans
les écorner... Est-ce que quelqu'un a une solution? Pour l'instant, je n'ose
pas toucher à la paire d'yeux que je n'ai--heureusement--pas trop mal
positionnés. D'autres critiques? Disons le prix, quelque 90 euros pièce
dans nos lointaines contrées d'Asie, ça fait cher (le jouet subit l'inflation
"normale" de tout produit d'importation). Et aussi le point suivant: malgré
(ou à cause de) l'indéniable réussite de ces deux versions, je ne suis
toujours pas convaincu par la vocation de plate-forme du Playing Art.
D'autres artistes parviendront-ils à me séduire et, surtout, à me faire
passer à l'achat? Les séries de minis vont-elles faire évoluer le support?
Pour l'instant, ayant mis un singe sur chaque bureau, je peux dire que les
Playing Art Bali-Bali et Moon-K s'intègrent parfaitement à l'intérieur
moderne de l'homme de goût.